9 nov. 2012

La frénésie de l'apprentissage

Il y a deux semaines, les étudiantes de EWHA, tout comme les autres étudiants coréens, ont passé les examens de mi-semestre: les midterms. L'occasion pour moi de me plonger dans une culture de l'éducation et de l'apprentissage tout à fait particulière.
Une quinzaine de jours avant la semaine fatidique, la bibliothèque est prise d'assaut par des milliers d'étudiantes assoiffées de révision. D'apparence, elles semblent plongées dans leur lectures, les yeux rivés sur l'écran de leur ordinateur Samsung (apple ne doit pas faire de ventes sensationnelles ici...), très concentrées sur leur travail. Mais lorsqu'on y regarde de plus près, que neni! La maxime "les apparences sont parfois trompeuses" prend alors tout son sens.
La plupart des étudiantes arrivent à la bibliothèque très tôt le matin et repartent à la fermeture des portes. L'important étant de donner l'impression d'un travail acharné. La vérité est qu'elles passent un nombre incalculable d'heures à scruter leur téléphone, littéralement greffé à leur main droite (clin d'oeil spécial à celui qui se reconnaîtra ;) ). Elles chattent, sur Kakao Talk, le whatsapp coréen. Oui, en Corée, on n'utilise pas la même app que le reste du monde, on crée la sienne. Un peu comme les réseaux sociaux, les coréens sont sur Facebook mais sont aussi sur Cyworld, le Facebook coréen. Enfin bref.
Aussi, j'en ai surpris quelques unes regardant un épisode d'une série sur leur téléphone. Et pendant ce temps, l'heure tourne, contrairement aux pages des bouquins qui restent bien à leur place.
Et quand elles ne sont pas sur leur téléphone, elles dorment. Oui oui, elles sont un peu fatiguées? Qu'à cela ne tienne, elles préparent un petit coussin avec leur trousse de stylos et hop, elles s'endorment la tête posée sur la table pendant quelques (longues) minutes.
Et le mystère reste entier quant à leurs résultats scolaires. Ca tape dans le haut du tableau ici, et ça pleure pour un A- (équivalent du 5 en Suisse). Alors, j'ai essayé de comprendre de quelle manière elles étudient et qu'est-ce qui les rend si fatiguées. La réponse se trouve dans la structure même du système scolaire coréen.
Une bonne étudiante est une étudiante capable de mémoriser PAR COEUR 5 VOLUMES d'un livre de théorie et de les recracher tel quel. Bonjour l'effort!
Il y a des causes et des conséquences désastreuses à ce système. Tout d'abord, l'avenir d'une jeune personne en Corée est déterminé par l'Université qu'il ou elle va fréquenter, en fonction du prestige de l'établissement. Les jeunes triment comme des malades durant le collège pour avoir les résultats les meilleurs et pouvoir rentrer dans les meilleures universités du pays. Le tout est de faire honneur à sa famille en obtenant les meilleurs resultats possibles. Les questions liées à l'honneur et au prestige sont centrales en Corée. On n'apprend donc pas aux jeunes à réfléchir, à développer leur esprit critique et à être créatif, on leur apprend à apprendre par coeur. 
Bon, cette explication est très simplifiée mais l'essentiel y est!
Et la conséquence de ce type d'éducation est la création de petits moutons qui suivent ce qu'on veut bien leur dire. Comment imaginer une économie dynamique, créative et compétitive si l'on ne forme que des employés qui suivent à la lettre les ordres?

On m'a dit que certains professeurs interdisaient aux étudiantes de les interrompre pendant leur leçon, c'est pour dire!
Après-midi sudieuse dans la salle de travail dl'ECC building de EWHA


La Corée avance trop vite, elle ferait mieux de ralentir et de réfléchir à sa direction plutôt que de foncer tête baissée.

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